Powerpoint blues
Encore quelques noms à ajouter à longue liste des insatisfaits du travail que j’ai rencontrés. Insatisfaits de leur boulot, tout comme moi. J’aime mon métier, celui pour lequel j’ai été formée, mais mon travail, l’activité pour laquelle on me salarie, sans réévaluation depuis 2 ans, me sort par les yeux. Chacun a ses raisons, mais quand on a comptabilisé les sales petits chefs, les coups bas du stagiaire, les avancements illogiques, les salaires grotesques, les horaires d’esclave, l’absence de management et la stratégie illisible, le bilan est le même : tous déçus, voir déprimés, voir malheureux.
Je ne sais plus à quoi je m’attendais ni ce qu’on m’avait dit précisément du monde du travail. Je revois ma première rencontre avec une pointeuse et une machine à café, quand à même pas 16 ans, mon père m’a collé un job d’été. Je n’ai pas le souvenir de m’en être fait une image idyllique, ni que l’environnement m’ait semblé cauchemardesque. Même pas eu peur. Qu’est-ce qui s’est passé alors ? A-t-on trop fait rêver les étudiants que nous étions d’un travail qui rend heureux ? A-t-on réellement cru, bandes de cruches, pouvoir s’épanouir devant un écran qui fait mal aux yeux ? Sommes-nous éternellement condamnés à l’insatisfaction ? Ou à la création d’entreprise (naan, pas ça !) ?
Toi, djneuz qui me lit, sache que le métier de tes rêves, pour lequel tu renonces aujourd’hui à la redif de Dawson sur TF6, te conduira peut être à la consommation de Prozac pour cause d’indigence managériale. Toi qui espères que de longues études te rendront riche et beau, sache qu’errent dans Paris des tas de bons salaires malheureux comme tout dans leur peau d’analyste financier, genre qui auraient voulu être artistes pour pouvoir faire leurs numéros, mais qui font de l’avion 4 heures par jour et vivent à Orly. Toi qui t’inquiètes d’un avenir incertain, sache que tant que tu n’as pas enquillé des dizaines de réunions de contrôle de gestion avec des PowerPoint de toutes les couleurs, tu te crois prémuni contre toute forme de torture, alors que certaines n'ont pas encore été dénoncées par Amnesty. Prépare toi au pire.
Le travail, ça sert à manger et à payer le loyer. Quand on y trouve en plus une reconnaissance personnelle, une stimulation intellectuelle et qu’on a de l’affection pour les gens avec qui on travaille, il faut se considérer comme un privilégié. Un vrai winner.
Ce qui est certain, c’est que le mécontentement chronique devant la note de service est à l’origine d’un certain nombre de vocations de bloggers. On s’en félicitera.