lundi 23 septembre 2002

Brisage de charme

C'est bien beau l'amour, mais il y a toujours des briseurs de charme pour vous faire perdre toute velléité de romantisme. Car j'estime de mon devoir de prévenir des amis chers qui s'aventurent au-delà des limites du supportable…

Voilà, le PaCa et le OuF, qui sont z'amoureux (avant la prochaine engueulade "t'es comme ta mère!") sont décidés à se pacser. La déclaration d'amuuuuuuur du PaCa est d'ailleurs bien belle. Que de romantisme : un PACS, des fleurs, jetons du riz mes amis !

Eh ben pas du tout. Le PACS est le truc le plus anti-romantique de la Terre. Je le sais, car mon Homme et moi-même furent candidats à une époque (avant de renoncer, voir plus loin). Mais voilà, le PACS, c'est la galère.

C'est d'abord une merdification administrative sans nom, des formalités à foison et un guichet pas des plus romantiques : le Tribunal d'instance de la commune de résidence, c'est-à-dire, pour les Parisiens, un bureau meublé 1973 dans la Mairie d'Arrondissement. L'interlocuteur : un fonctionnaire aigri équipé d'un Zénith de Bull et d'une imprimante NEC à aiguilles, non connectés l'un à l'autre.

Le dit fonctionnaire, n'est pas là pour être le témoin de votre amour éternel et il vous le fait bien sentir. Il n'est même pas là pour vous rendre service, mais plutôt pour vous dégoûter de la plus simple forme d'engagement devant l'État. On ne demande pas une chorale, des roses rouges et une pièce montée, mais tout de même, la République pourrait être un peu plus avenante avec ses candidats au PACS.

Pour pacser, il faut énormément justifier : ta nationalité (voir plus loin difficulté pour les noms de métèque), ton domicile (pas facile quand tout est au nom de l'un des deux), ta relation avec ton PACS (pour pas pacser avec quelqu'un de ta famille, c'est mal)…

"Il faut tout d'abord rédiger et signer une convention dans laquelle les partenaires fixeront librement les modalités de leur vie commune, sous réserve des obligations prévues par la loi". Super sex, non? "Les modalités de leur vie commune", ça doit être pour définir une bonne fois pour toute qui dort du côté gauche et qui fait la vaisselle les jours impairs.

Afin de briser tout élan de tendresse, on conseille ensuite aux deux prétendants de faire une déclaration devant le notaire. Parce qu'après en cas de séparation, le PACS peut se terminer en combat à mort pour savoir qui va récupérer les petites cuillères (tordues) et le pouf poire jaune de chez IKEA.

Une fois que tous les papiers sont obtenus, il faut se rendre conjointement (main dans la main pour ceux qui persistent) devant Monsieur Tout Gris, Greffier du Tribunal d'Instance, qui te fait signer trois papelards sur un coin de table en persistant à ignorer que cet instant précis constitue le plus fort et le plus fol engagement de toute ton existence sur cette Terre. Même pas question de se rouler ne serait-ce qu'une petite pelle devant son bureau en formica.

Pourquoi qu'on a renoncé Mon Homme et moi ? Et bien parce qu'il avait vécu quelques mois avant ma demande en PACS, une expérience des plus douloureuses avec le Tribunal d'instance de notre arrondissement. Le voilà lauréat d'un concours administratif, et de ce fait, obligé d'attester de sa nationalité française dans un délai de deux semaines. Mais voilà, la Dame du Tribunal d'instance le regarde de traviole car il porte un nom de métèque. Père étant né côté bougnoule de ce que fût la Grance France coloniale et Grands Parents étant tous plus ou moins Romano-Malto-Turcs, le voilà contraint de justifier ce qu'il est depuis son premier cri : Français.

Pour obtenir le précieux formulaire, il aurait fallu tomber sur une fonctionnaire normale, c'est-à-dire serviable et compétente. Mais voilà, celle-là ne l'était pas. Suspicieuse sur ses origines, injurieuse avec le seul interlocuteur qui pouvait rapidement sauver l'affaire, elle annonça soudainement son départ en vacance à la fin de la semaine, sans remplacement. Cher administré, ton papier, ta nationalité et ton concours qui seul peut te sortir du chômage de longue durée, tu peux te le foutre au cul car une cinglée a tous les pouvoirs et n'est pas remplacée après le 14 juillet.

Avec un peu de chance, beaucoup de courage et une gentille fille dans sa mairie de naissance, Mon Homme est sorti in extremis de cette affaire de nationalité (imaginez les pas-Français comme ils sont dans la merde).

Alors les gars, je vous en souhaite bien du courage. Parce que nous deux, on préfére encore s'aimer en toute clandestinité que de subir la bêtise et la méchanceté d'un vieux rat de bureau qui jouit d'avoir un pouvoir insensé sur ta vie.

Alors, beaucoup de courage et de Champagne (pour nous) !