vendredi 10 septembre 2004

La gloire de mon père

C’était mardi midi. Un beau soleil pour un déjeuner qui allait durer, je le savais. Je me doutais aussi qu’il serait ému et que je serais gênée. Mais je ne pensais pas qu’en quelques minutes tout redeviendrait comme avant. Malgré ces 8 années de silence, de mon fait, il reste mon père et je reste sa fille.

Je l’ai attendu un long moment au bout du quai, gare de l’Est. Evidemment, je l’ai tout de suite reconnu, parce que malgré les années, sa démarche n’a pas changé. Tout de même un choc de le revoir, énormément vieilli, un peu voûté, marqué, bouffi, sûrement à cause de sa santé précaire. Il n’a que 56 ans.
Il a commencé par me dire : “ je ne t’aurais pas reconnu… en te croisant dans la rue… non, sauf si j’avais croisé ton regard ”. Un aveu étrange, déstabilisant… que m’est-il arrivé pour que tu ne me reconnaisses pas ? Merde ! C’est donc que j’ai vieilli moi aussi…

Je le sens nerveux et je ne sais pas quoi dire. Nous allons dans une brasserie. Nous commandons la même chose, comme c’était souvent le cas il y a quelques années : des bouffeurs d’huîtres et de café liégeois. Le café liégeois, dessert fétiche de la famille : un peu de chantilly sur de la glace.

La conversation a soigneusement évité les sujets qui fâchent pour se concentrer sur l’ordre du jour : nos affaires, les papiers qu’il veut me faire signer et qui concernent la transmission de son entreprise à sa mort. Je l’avais bien prévenu que je n’y comprends rien et qu’il allait devoir m’expliquer tout ça en termes simples, voir simplistes. Effectivement, j’ai tout compris. Je lui ai donc posé toutes les questions qui me passaient par la tête à propos de sa boîte, son personnel, son réseau de vente… enfin des questions d’actionnaire, puisque actionnaire je deviens, symboliquement. Qu’importe, j’irai la visiter cette usine puisqu’il me le propose et qu’il en est si fier. Il y a de quoi, c’est vrai, mais il lui doit sûrement sa sale mine. Alors que moi, je suis mal payée, je me farcis des cons toute la journée, mais je constate que pimpante je demeure… mouais… Fier, je le suis aussi de ce qu’il a réussi à faire, parce je sais d’où il vient et je me souviens de mes premières années de vie, moins opulentes dirons-nous.

Ce qui m’a rappelé que je lui ressemble, c’est surtout qu’au bout de 5 minutes, il racontait déjà des conneries… on aurait dit moi. Toutes sortes de conneries, pour me faire rire. Mon Dieu ! Les chiens ne font décidément pas des chats.

Nous avons brièvement évoqué ma vie – je ne tenais pas à m’attarder sur le sujet – puis nous nous sommes raconté nos voyages de ces 8 dernières années. Ses vacances, il les passe désormais avec une autre famille, avec une ancienne copine de classe de seconde, fille de sa nana actuelle… et avec les enfants de celle-ci, qu’il a l’air de chouchouter comme un bon papi. Il les emmène même là où nous passions toutes mes vacances d’enfant, ils font leurs pâtés dans le même sable. De mon côté ? Rien en vue ma foi…

Notre famille, ou plutôt la sienne puisque je ne les ai jamais revu non plus, a été évoquée aussi. Mes inénarrables cousins, tous égaux à eux même. Le petit dernier de la tribu, âgé de 25 ans, n’a jamais été vu avec une fille ? Ben, je ne vais pas m’esclaffer de surprise. Rappelons qu’âgé de 4 ou 5 ans, il se déguisait avec les fringues de sa mère, voulait que je lui mette mes boucles d’oreilles, se faisait des couettes et rajoutait « ette » à la fin de son prénom… C’est déjà un miracle qu’il ne soit pas Drag Queen à Ibiza.

Donc voilà, c’est fait, je l’ai revu, je lui ai parlé et je vais le revoir. Je vais même lui succéder, si ça se trouve… Je n’en suis pas à me dire qu’on va s’appeler, déjà parce qu’on ne s’appelait pas vraiment avant. Mais le lien est recréé, c’est ce qui compte, même si je sais que ça ne sera pas toujours si simple. J’avais déjà une mère qui me cassait les pieds (qui devient une mère juive avec le temps, on ne m’épargnera décidément rien…) maintenant, j’ai un père qui potentiellement en est capable (plus tendance mormone de son côté). Cela dit, si on veut me demander en mariage, maintenant on sait à qui s’adresser (quoi ? j’ai pas dit que j’accepterai…).

Ce mardi, nous nous sommes quittés rapidement puisque l’heure tournait, qu’il lui fallait reprendre son train et moi retourner au bureau. Et là, pris par l’émotion, il s’est laissé allé à ce qui représente pour lui le comble de la démonstration effective. Pour lui, et pour un père en général, envers une fille unique perdue de vue. En plus, on n’est pas démonstratif dans la famille, d’ailleurs moi-même…. Il m’a juste dit qu’il était heureux et je réalise quel effort c’était pour lui d’exprimer un sentiment, même un pti. Un truc qu’il ne fait pas tous les jours et dont je n’ai pas mésestimé la valeur. C’était un peu de chantilly sur de la glace.

mercredi 8 septembre 2004

Bip him, he’s famous
la groupie du Bostelliste

Hier soir, il était à quelques mètres de moi, et il n’arrêtait pas de faire des allers-retours entre la salle et l’entrée du restaurant. C’était pour l’avant-première de son film avec toute l’équipe. D’ailleurs il semblait stressé en partant vers l’UGC, puisqu’il porte toute la promo sur ses épaules. Je ne rate d’ailleurs pas une émission où il est, ses tirades interminables et farfelues ne me lassent pas.
Alors mon verdict final : comme largement supposé, il est vraiment trop mimi, trop charmeur, trop tout bien, et il a même un joli cul, en plus de la voix trop sexe et de tout le reste. Aaaaarrrrgggg…
Au début, je matais discrètement et après 3 verres de blanc, j’étais pas loin d’aller lui rouler une grosse pelle, malgré ma probable forte odeur de crevettes (à cause d'une très snob monodiète à base de fruits de mer entreprise depuis dimanche). Je l’ai tellement maté quand il attendait ses partenaires sur le Cour Saint Em’, qu’il a fini par se retourner vers moi (un peu eu honte quand même).
Edouard, je retire tout ce que j’ai dit sur toi, Edouard, Edouard, Edouaaaaaarrrd ! ! !

mardi 7 septembre 2004

Fixée en septembre
Je vous fais grâce des droits d’auteur

A l’instar de The Very Messante qui « n’est pas inquiète », je suis devenue coutumière d’une formule toute faite dont je tiens à faire ici la promotion : « tu seras fixé(e) en septembre ».
Je ne sais pas pourquoi. Je me suis juste aperçue, courant août, qu’à tout problème qui m’était soumis, qu’à toute interrogation dont on me faisait part, je répondais invariablement « tu seras fixé(e) en septembre ». Et cela sans stratégie de ma part, et sans que cette réponse constitue pour moi une échappatoire ou une fin de non-recevoir vis-à-vis de mon interlocuteur. Non, le plus sérieusement du monde, et avec toute l’attention que j’ai pu porter aux confidences qui m’étaient faites, j’ai réalisé que ma réponse systématique « fixé en septembre » était hautement appropriée, tout en relevant de la plus grande sincérité et implication dans la conversation. C’est un fait : « fixé en septembre » s’avère une réponse parfaite pour tous types de problèmes :
- ton ex-mari te cherche des poux dans la tête ? Te pourris pas les vacances : tu seras fixée en septembre
- ton nouveau chéri n’a pas l’air de vouloir s’engager ? Te fais pas de la mauvaise bile sur la plage : tu seras fixée en septembre
- ton avenir professionnel n’offre aucune garantie ? Te ruine pas la santé pour une fois que tu prends le soleil : tu seras fixée en septembre.

Et ce n’est qu’un bref aperçu du pouvoir magique du « fixé en septembre ». On peut même le placer en réunion : « le marché sur lequel on s’est positionné en juillet est en cours de discussion : on sera fixé en septembre ». Le grand avantage du « fixé en septembre » est qu’il peut s’adapter aux évolutions calendaires. Il peut très prochainement devenir un « fixé en octobre » , ou plus sûrement un « fixé avant Noël », avant d’exploser de pertinence sous la forme d’un « fixé en 2005 » du meilleur effet.

Comme moi, soyez toujours à propos, usez et abusez du « tu seras fixé en septembre ».