Ils se sont aimés
Dans une semaine, le PaCa et moi, on divorce. Après une année de colocation burolistique (et déjeunatoire), on va retrouver chacun un joli placa... bureau individuel. C’est la fin d’une grande histoire, passionnelle et enflammée. Ce jour même, nous nous lancions encore des trombones à la gueule.
Dans ce bureau qui sent la pisse et le dessous-de-bras, on a beaucoup fait de la chaise, et même de la chaise en couple (à deux sur la chaise de bureau et en faisant des figures comme au patinage), on s’est moqué de nos collègues (les raclures flagorneuses qui travaillent ici), on a rigolé comme des baleines et on s’est engueulé, surtout quand ça parlait géographie de la France, car PaCa est une vraie burnasse. C’est un gars qui vous mettrait bien Rodez dans le Finistère et le Limousin dans la Haute-Saône. Et moi, les départements, les chefs-lieux de canton, les capitales régionales de la chaussure à clous, ça me passionne. Je ne tolère pas qu’on écorche la géographie hexagonale. Je deviens méchante comme une vieille instit acariâtre d’après-guerre. J’ai envie de lui taper sur les doigts avec une règle en fer.
On le savait bien, nous, que c’était pas une bonne idée de nous mettre ensemble, nous qui séparément étions déjà les deux plus méchants, les deux anciens toujours près à critiquer notre chef illustrissime (ingrats que nous sommes) et à se foutre de la gueule de ses éminents collaborateurs (à gros melon). Mais ils l’ont fait, et ils l’ont bien vite regretté. C’est devenu le bureau des deux vieux du Muppets Show.
Niveau vulgarité, au début c’était une annexe de chez Jean Roucas (quéquette, trou, poil) pour devenir Fun Radio la nuit (fist fucking, mouiller de la chatte, suppurer du gland). Niveau concentration, au début on discutait un peu et avant-hier, on dansait sur du Tarkan. Niveau propreté, au début ça sentait juste le pipi de chat, maintenant on songe à pisser sur la moquette pour la finir et PaCa asperge les murs avec son aspergeur à plante. Niveau respect, au début on fermait la porte pour les insulter, maintenant on les attend sur le pas-de-la porte mais plus aucun n’ose circuler devant le bureau. Peur de se faire cracher dessus.
Voilà le récit d’une erreur de stratégie en matière de gestion du personnel, mais aussi le récit de notre déchéance en tant que salariés dignes. Car la dignité, qui fut notre première devise, a fait long feu.
Aujourd’hui, nous deux, c’est un peu Sid and Nancy. On est deux punks nihilistes qui faisons peur à tout le monde. On programme la destruction de notre matériel de travail et on écoute de la musique de rock (Anarchy in the Bôcravail). On prend aussi des substances aliénantes qui nous détruisent petit à petit. PaCa est bouffi, pas par l’héro, mais par la cuisine au beurre et moi j’ai des convulsions nerveuses quand je dépasse ma dose (deux thés verts l’après-midi). Il est temps que ça s’arrête, on est allé au bout de nous-même.
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jeudi 10 avril 2003
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