mercredi 29 mars 2006

Le pouvoir doit se définir par la possibilité d'en abuser
André Malraux (Ecrivain et homme politique français)

Vous le savez, ce n’est pas le style de la maison de citer feux-les ministres du Général. C’est pourtant à ce type de citation que me renvoie l’immense pouvoir que je me suis découvert.

Des bizarreries, il n’y a que ça dans l’informatique de « Fais le avec tes doigts S.A. », mon employeur. Mais j’en ai déniché une qui fait de moi la maîtresse absolue du jeu : depuis mon petit poste, j’ai accès à tous les postes en réseaux. Non seulement aux données privées de chacun sur le serveur, consciencieusement verrouillées, mais, et sans que mes collègues le sachent, j’ai également accès au contenu de leur disque dur. A tout leur disque dur, y compris le très privé que l’on peut stocker en toute confiance parce qu'on a mis un mot de passe. Vous voyez, le genre lettres à l’inspection du travail pour se plaindre des cadences infernales, photos de vacances à poil sur la plage de Montalivet, courriers enflammés à un illégitime… Bref, les trucs que l’on cache dans un dossier intitulé « Perso ».

Par correction, j’en ai quand même averti mon chef, un être rayonnant de clairvoyance qui vient de m’attribuer du rab de RTT (et qui vient ici parfois, salutations respectueuses).

L’enseignement qui m’est apporté vient du fait que par ce simple phénomène résultant de l’incurie de notre boîte d’informatique, j’ai un bref aperçu de ce que peut être l’exercice du pouvoir. Parce que je me fais un devoir de ne pas aller mater Machine à poil à Montalivet et de ne pas fliquer les tendances à la délation administrative de Bidule. C’est parce qu’on a du pouvoir qu’il ne faut pas en abuser. Le seul exercice que j’en ai fait jusqu’à présent a consisté à restaurer les données d’un malheureux qui avait son poste tout planté. Mais sinon, je saurai me montrer digne de cette toute-puissance inattendue. Surtout que je ne vais pas avoir le droit de la garder (ça m’apprendra à être honnête).